ITINERAIRE D’UN CINEPHILE ET DE SON PERROQUET GATE
L'EPOPEA DELL''ERASMUS, UN CORSARO DI CARAVAGGIO !
Chronique de Kristian Fredric
2 septembre 2024
Photos Mostra di Venezia
Ah, la Mostra de Venise, ce sanctuaire sacré où les cinéphiles se rassemblent pour célébrer l’art du cinéma dans toute sa splendeur. Entre le Lido, ses plages ensoleillées, et les projections sous les étoiles, on se croirait presque dans un rêve éveillé. Chaque année, Venise devient le théâtre d’une parade éblouissante où les plus grands talents se rencontrent, échangent, et nous rappellent pourquoi le cinéma est un art essentiel. C’est l’endroit où la magie opère, où même le plus cynique des spectateurs se laisse prendre au jeu, se laissant emporter par la beauté et la puissance des histoires projetées sur grand écran.
Mais avant de pouvoir me plonger dans cette mer de culture en ce premier jour de festival, je dois gérer un petit problème à plumes : Roudoudou, mon perroquet. Ce cher Roudoudou, qui n’a jamais raté une occasion de donner son avis bien tranché, a malheureusement hérité de mon esprit critique. Le laisser seul pendant que je m’évade à la Mostra ? Inconcevable. L’emmener avec moi ? Encore pire ! Imaginez un peu la scène : un perroquet bruyant en plein milieu d’une salle comble, qui commente chaque plan, chaque réplique, et surtout, chaque tenue… Non merci. Donc, je fais ce que tout maître raisonnable ferait : je lui mets un petit programme. Pas n’importe lequel, non, l’intégrale de Claude Lelouch. Pourquoi Lelouch, me direz-vous ? Eh bien, disons que ses films ont ce pouvoir étrange de plonger les êtres les plus hyperactifs dans un sommeil profond. Roudoudou, après une ou deux scènes langoureuses, tombe comme une pierre. Je pars tranquille, sachant qu’il sera trop occupé à ronfler pour critiquer.
Me voilà donc sur la pointe des pieds, en route pour le vaporetto. Et là, laissez-moi vous dire que la traversée est loin d’être une promenade de santé. Sous une chaleur écrasante, digne du désert dans Lawrence d’Arabie, je me fraye un chemin à travers une foule compacte. Tout le monde semble avoir eu la même idée que moi, à croire que la moitié de Venise s’est donné rendez-vous sur ce bateau. Mais peu importe les petites sueurs et les coudes dans les côtes, car je sais que la destination en vaut la peine : la Mostra, le paradis des cinéphiles.
Première étape : la salle Giardino. Là, je m’installe pour assister à la sélection Orizzonti Extra, cette catégorie si particulière qui met en lumière des films audacieux, souvent surprenants, qui nous emmènent hors des sentiers battus. Et c’est là que le choc survient. Vittoria d’Alessandro Cassigoli et Casey Kauffman. Un film qui vous attrape dès les premières images et ne vous lâche plus.
Voilà un film qui m’a pris par surprise, comme une vague en pleine figure alors que je pensais tranquillement naviguer dans une mer de drames ordinaires. Imaginez Jasmine, quadragénaire napolitaine, qui semble avoir la vie idéale : un mari aux petits soins, trois enfants adorables, et un salon de beauté qui marche du tonnerre, juste à côté de là où elle a grandi.
La belle vie, non ? Eh bien, c’est sans compter sur le destin, qui adore chambouler les plans bien établis.
Tout commence après la mort de son père. Jasmine se met à faire un rêve étrange et récurrent : une petite fille coure vers elle, et dans ce rêve, elle ressent un bonheur absolu, une plénitude qu’elle n’avait jamais connue. Vous me direz, ce n’est qu’un rêve, non ? Mais non, Jasmine, elle, elle y voit un signe, une mission presque sacrée. La voilà lancée, comme un marin en pleine tempête, dans une quête insensée : retrouver cette enfant à travers l’adoption internationale. Et croyez-moi, ce n’est pas une croisière de plaisance. Son mariage prend l’eau, ses enfants se demandent si leur mère n’a pas perdu la boussole, et elle-même se retrouve à remettre en question tout ce qu’elle pensait savoir sur la vie.
Vittoria n’est pas juste un film, c’est une plongée profonde dans les courants mystérieux de l’âme humaine. Ça vous emmène loin, très loin, là où les désirs irrationnels gouvernent, là où la logique n’a plus sa place. Inspiré de faits réels, ce film capte la vraie histoire de gens qui ont vraiment traversé cette mer agitée, avec une touche cinématographique qui ne vous lâche pas une seconde. C’est un peu comme être à bord d’un bateau qui tangue, mais où chaque vague est une nouvelle révélation sur ce qui nous pousse vraiment à agir.
Et ce n’est pas tout. Dans la salle, à quelques sièges de moi, se trouve Nanni Moretti, le grand, l’unique. Le maître du cinéma italien, celui dont chaque film est une ode à la vie, à la complexité des relations humaines, et aux dédales de Rome. Je suis dans un état de grâce cinématographique.
Mais le retour, ah le retour, c’est une autre histoire. Imaginez un vaporetto plein à craquer, de plus en plus chargé à chaque arrêt, au point que l’idée d’un naufrage semble presque inévitable. Chaque vague est une nouvelle frayeur, chaque minute une éternité. Finalement, j’arrive enfin à bon port, prêt à retrouver mon bateau et mon fidèle Roudoudou.
Et là, surprise. Roudoudou m’attend, mais quelque chose cloche. Loin d’être assoupi comme prévu, il est là, les plumes ébouriffées, une bouteille de Grappa à moitié vide à ses côtés. L'air triomphant, il se met à siffler l’air d’Un Homme et une Femme — vous savez, ce célèbre "chabadabada… chabadabada " qu'on entend partout. Sauf que, entre deux notes, il glisse des insultes colorées, à l’encontre du cinéma de… devinez qui ? Oui, Claude Lelouch. Visiblement, au lieu de s'endormir, il a pris goût à la bande sonore et s'est improvisé critique de cinéma.
Et là, je réalise : peut-être que j’ai créé un monstre. Non seulement il a survécu à l’intégrale de Lelouch, mais en plus, il est maintenant en pleine forme pour me casser les oreilles avec ce maudit "chabadabada… chabadabada…lalalala… ". À ce rythme, je vais devoir lui trouver un autre réalisateur à critiquer. Peut-être Bergman ? Mais bon, pour l'instant, je fais profil bas et j'accepte mon sort. Après tout, ce n’est pas tous les jours qu’on a un perroquet mélomane et cinéphile.
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